A l’ancien – Notre collègue et frère Boyer Robert
À l’Ancien
Notre collègue et frère BOYER Robert
Sapeur-pompier à Saint-Denis (974)
Entré en 1961 à l’âge de 24 ans
Parti à la retraite en 1997 avec le grade de sergent
Hommage à un collègue, un frère d’armes et un ami
Dans une carrière, il y a des rencontres ordinaires… et puis, parfois, des personnes hors du commun croisent notre chemin et laissent une empreinte indélébile.
C’est ainsi qu’au début de ma carrière de pompier — j’avais 21 ans — j’ai croisé celui que j’ai tout de suite considéré comme un ancien. Il avait déjà vingt ans de service.
J’ai eu la chance et le privilège de rencontrer celui que tout le monde appelait affectueusement Tichef. Ce surnom, il ne le devait ni à un grade ni à une fonction, mais à cette autorité bienveillante qu’il dégageait naturellement. Il incarnait le sens de la responsabilité, ce talent pour fédérer autour de lui, toujours dans la bonne humeur.
Il n’était pas ce qu’on appelle un grand sportif — il en plaisantait souvent lui-même, avec ce sourire et ce rire qui lui allaient si bien.
Il ne cherchait pas à briller dans les exercices physiques, mais possédait d’autres qualités, bien plus précieuses : l’écoute, la bienveillance, la sagesse, et cette capacité incroyable à apaiser les tensions et à insuffler de la joie, même dans les situations les plus difficiles.
Là où d’autres cherchaient à s’illustrer, Tichef préférait prendre la main, encourager, accompagner.
Aimable, serviable, joyeux et profond, il avait ce don rare : apporter du réconfort dans les moments sombres. On pouvait compter sur lui en toutes circonstances, non seulement pour son sérieux au travail, mais aussi pour cette présence rassurante. Une petite parole suffisait à redonner le sourire.
Très spirituel et profondément chrétien, Tichef tirait de sa foi une force tranquille. Sa croyance sincère n’était jamais ostentatoire : elle se lisait dans ses actes, dans sa façon d’être avec les autres.
Il croyait en la bonté humaine, au pardon, à l’entraide. En chaque personne, il voyait un frère ou une sœur à respecter et à soutenir.
Dans les années 1960, le métier était particulièrement exigeant. Peu de moyens matériels, des équipements rudimentaires, des conditions d’intervention souvent périlleuses, des tenues sommaires, des communications limitées. Et malgré tout cela, un dévouement constant, un courage exemplaire, une solidarité sans faille entre collègues, un profond sens du devoir envers la population.
J’ai eu le privilège de décaler avec lui sur le terrain. C’était une autre personne. Il connaissait son secteur sur le bout des doigts, savait où se trouvaient les bouches à incendie. Ses décisions étaient rapides, nettes, claires. Pas de S.O.I.E.C à l’époque, mais il connaissait par cœur la marche générale des opérations, grâce au R.I.M., la bible des sapeurs-pompiers.
Avec lui, on se sentait en sécurité. Les plus jeunes avaient un dicton :
« Envoye n’importe ! »
On était prêts à faire face à n’importe quelle situation.
Tichef fait partie de ces anciens qui ont posé les bases des services modernes de secours et d’incendie de La Réunion.
Après de longues années de service, il est parti à la retraite il y a plus de trente ans. Mais pour moi, cette retraite n’a jamais été la fin de notre relation. Nous avons toujours gardé le contact, fidèles à cette fraternité de cœur qui unit les soldats du feu.
Je l’ai vu traverser les années avec la même lumière dans le regard, le même rire. Il avait la conviction profonde que la vie mérite d’être vécue avec simplicité, générosité et gratitude.
Tichef nous a quittés récemment à l’âge de 88 ans. Il laisse derrière lui le souvenir d’un pompier dévoué, d’un collègue exemplaire, mais aussi — et surtout — celui d’un chrétien fidèle et discret, pour qui l’espérance et la charité étaient des piliers essentiels.
Aujourd’hui, avec tous ceux qui l’ont connu, je tiens à lui rendre hommage et à saluer la mémoire d’un ancien courageux et dévoué.




















Laisser un commentaire